Le corpus des textes martyrologiques syriaques à l’étude comprend l’ensemble des récits syro-orientaux connus du règne de Husraw Ier: sur les six textes formant l’ensemble, quatre sont dans leur langue originale, le syriaque. Ils sont pour l’essentiel inédits et n’ont jamais fait l’objet de traduction en français. L’un des objectifs de ce programme était de réaliser ces traductions : une édition critique des trois principaux récits syriaques accompagne ce programme (publiée par F. Jullien dans la collection des Scriptores Syri du Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium de Louvain, diffusion Peeters Publishers); ces versions sont également accessibles grâce au moteur de recherche qui permet d’afficher toutes les informations du corpus en matière de toponymie, d’anthroponymie et d’administration sur cette époque. Ces documents se caractérisent par la grande qualité de leurs informations. La plupart des rédacteurs de cette période sont des contemporains qui utilisent pour leurs narrations des comptes rendus, et sont parfois eux-mêmes des témoins des faits.
Parmi les six textes, quatre sont en syriaque :
- le Martyre de Grigor Pīr-Gušnasp, le général en chef des armées du roi (mort en 542 = l’an 10 de Husraw Ier);
- le Martyre de Yazd-panāh, juge et gouverneur (mort en 544 = l’an 12 de Husraw Ier) et de ‘Awira, notable (mort en 545 = l’an 13 de Husraw Ier);
- l’Histoire de Mār Abba, catholicos de l’Église d’Orient (mort en 552 = l’an 21 de Husraw Ier);
- le Martyre de Yazdōy-Christina.
Deux autres ont fait l’objet d’une transmission inter-culturelle : l’un est conservé en grec, l’autre en arménien et en géorgien, versions effectuées à partir d’un original syriaque aujourd’hui perdu :
- l’Histoire de Šīrēn (morte en 559 = l’an 28 de Husraw Ier), conservée en grec. Voir présentation dans le Corpus grec.
- l’Histoire de Yazd-bōzēd (mort en 553 = l’an 22 de Husraw Ier), conservée en arménien, en géorgien, et un fragment en syriaque (?).
Les passions syriaques se trouvent consignées dans deux manuscrits conservés soit à la British Library, soit à la Staatsbibliothek de Berlin. Une édition en syriaque avait été établie par Paul Bedjan en 1894 et en 1895. Concernant l’Histoire de Yazd-bōzēd (BHO 433 et 434), les versions arméniennes et géorgienne ont été publiées avec une traduction en latin dans les Acta Sanctorum de Novembre (IV, 1925, p. 204-213).
Trois de ces récits composent en eux-mêmes un cycle puisqu’ils s’enchaînent dans leur déroulement chronologique : le témoignage de Grigor suscite celui de Yazd-panāh puis d’‘Awira et, plus tard, de Yazd-bōzēd. La biographie de Mār Abba est isolée et indépendante de ce groupe.
L’un des intérêts de la mise en synergie de ces documents tient à la richesse de leurs données en matière de géographie historique, d’histoire administrative et des institutions sassanides. Ces récits offrent des renseignements d’une grande exactitude sur les pratiques judiciaires en milieu perse, sur les relations et les controverses inter-religieuses entre chrétiens et mazdéens mais aussi entre chrétiens d’obédiences christologiques différentes. Le corpus ici réuni vient apporter un éclairage complémentaire aux matériaux des sources archéologiques dont il peut aussi pallier les lacunes, offrant une contribution majeure pour une nouvelle histoire du VIe siècle en Iran.